• C'est le soir. La lumière faiblit. Le soleil entame sa lente descendante dans l'horizon pour se coucher. Quant à moi, je suis allongée sur mon lit à regarder fixement le plafond. Je suis allongée sur mon lit, les mains sur mon ventre, sans rien faire d'autre que de fixer le plafond blanc de ma chambre. Il n'y a pas un bruit, à part une faible musique provenant de ma radio à laquelle je ne fais que très peu attention. Je ne vois pas ce que je pourrai faire en attendant que l'on m'annonce qu'il est temps de venir manger. Mon ordinateur est allumé, posé à sa place, sur mon bureau. Mais je n'y suis pas, je n'ai rien à y faire. A part rester assise sur ma chaise à scruter l'écran avec anxiété et espoir de le voir se connecter sur un célèbre réseau social, je n'ai rien d'autre à y faire. Alors je reste là, sur mon lit, à observer sans regarder le plafond. Et je m'interroge sur moi-même, et sur ce garçon que je côtoie régulièrement au lycée. Un garçon très gentil, l'un des seuls qui daigne m'adresser la parole. On parle de tout et de rien, on rigole bien ensemble aussi. Lorsque je le vois, et que l'on discute, j'ai l'impression que le temps s'est arrêté, qu'il n'existe plus rien d'autre autour de nous. La fin du monde pourrait avoir lieu que je ne paniquerais pas, tant que je suis avec lui, tant que mon regard peut plonger dans le marron de ses yeux. Un regard qui m'hypnotise, me captive tellement qu'il est intense, doux, rempli d'affection et de sympathie. Et lorsque je pense à lui, quelque chose que je ne saurai définir s'empare de moi. J'ai la sensation qu'un agréable trou se creuse à l'intérieur de moi, que ma respiration se fait plus difficile par certains moments, sans que cela ne me dérange. Je regarde le plafond, et j'imagine tout un tas de scénario farfelus, irréalistes, alimentés de rêves de belles histoires d'amour d'adolescente. J'ai comme l'impression que mon cœur se serre. Serais-je entrain de ressentir plus qu'une simple amitié ? Serait-ce cela que les gens recherchent sans cesse ?

     

    C'est le soir. La lumière faiblit. Mais je n'y prête pas attention. Je suis devant mon ordinateur, les doigts au-dessus de mon clavier. Je regarde la fenêtre qui s'est ouverte, sa photo et son nom affichés tout en haut, et un rectangle blanc. Je sais qu'elle est connectée, je le vois par le point vert à côté de son joli nom. Mais j'hésite. Je ne sais pas pourquoi mais j'hésite. Je ne devrais pas, il s'agit d'une simple amie. J'espère secrètement qu'elle vienne me parler la première, pour que je n'ai qu'à lui répondre. Et si elle vient me parler d'elle-même, cela voudra sans doute dire qu'elle tient à moi... Pourquoi je me pose de telles questions ? Ce n'est qu'une amie... Une simple amie... Et pourtant, je ne peux m'empêcher de regarder sa photo de profil, une simple photo d'elle durant les dernières vacances où elle est partie à la campagne. Ses cheveux châtains volent dans le vent, et ses yeux verts pétillent de bonheur. Des yeux verts magnifiques, selon moi. Je vais sur son profil, et je clique sur sa photo pour la voir en plus grand, et je souris en voyant son visage qui n'inspire que gentillesse, avec un léger sourire. Je connais ce sourire. Elle l'affiche quand elle est embarrassée, mais aussi à la fois amusée, voire heureuse. Je l'ai remarqué il y a quelques jours, lorsqu'un pote l'a taquiné sur notre complicité. Il s'agissait d'une simple blague, qui l'a amusé, mais aussi gênée. Il avait simplement dit que nous ressemblions à un couple d'amoureux. J'ignore comment je dois interpréter ce sourire suite à une telle phrase. Il n'a fait que de plaisanter, il n'y a pas de quoi se sentir mal à l'aise. Pourtant, elle l'était. Je ne sais pas pourquoi... Peut-être... Peut-être qu'elle m'aime bien ? Comme un crétin, moi, j'ai rougi. C'est ce même pote qui me l'a dit, pendant le cours d'anglais.

     

    C'est le soir. Il fait de plus en plus sombre. Mais je n'y prête toujours pas attention. Je suis toujours sur mon lit, allongée sur le dos à scruter le plafond. Il n'a rien d'intéressant, ce plafond blanc. Mais je le regarde sans le voir. Mes pensées vagabondent, et mon esprit est à mille lieux de ma chambre. La lumière de mon bureau s'impose davantage. Mais je n'y fais pas attention. Une même musique tourne en boucle sur mon ordinateur. Your Call, de Secondhand Serenade. Une chanson magnifique, que je ne me lasse jamais d'écouter. Elle m'aide à me détendre, et à réfléchir. Je pense sans cesse à lui. J'ai rêvé de lui la nuit dernière. Nous étions devant le lycée, il me souriait. Il m'assurait que tout irait bien, tout en conservant son sourire qui m'a mis aussitôt en confiance. Il m'a pris doucement la main, il a approché son visage du mien et à poser ses lèvres contre les miennes. Un baiser furtif, tel une caresse, et lorsqu'il prit fin, le décor n'était plus le même. Le lycée, la rue, la boulangerie, les voitures, les gens, tout cela avaient disparu, pour ne laisser place qu'à un champ de fleurs. Nous étions seuls au milieu de nulle part, et je m'en fichais. Puis, je me suis réveillée. J'ai maudit mon réveil. J'ai eu envie de le balancer par la fenêtre, mais je ne l'ai pas fait. Ce serait ridicule. Mais ce rêve était super. Je ne cesse de revoir les images dans ma tête. Il me paraissait tellement réel, comme tout merveilleux rêve. Je ne veux pas l'oublier, puisqu'il était merveilleux. Je me mets à sourire bêtement, comme une idiote, toute seule dans ma chambre. Je regarde le plafond, et je m'interroge. Pourquoi je me sens si étrange en ce moment ? Quelle est cette sensation étrange ? Je prends mon portable que j'avais précédemment jeté non loin de moi, et j'envoie un message à une amie. Peut-être qu'elle pourra m'aider.

     

    C'est le soir. Il fait de plus en plus sombre. Je suis toujours devant mon ordinateur, ne faisant rien d'autre que d'espérer qu'elle vienne me parler. Elle est connectée, je le vois, mais pourquoi ne vient-elle pas entamer une discussion ? Elle fait peut-être autre chose. A moins qu'elle n'en a pas envie... Je me prends la tête entre les mains, et je respire un grand coup. Cela me fait tout drôle d'attendre bêtement de cette manière, cela n'est pas dans mes habitudes. Je ne suis pas particulièrement patient, je n'aime pas rester comme un idiot au même endroit sans rien faire. Heureusement que je suis tout seul chez moi, coincé sous l'escalier. Mes parents sont partis au restaurant, ma mère accompagnant mon père pour un diner entre collègues. Au moins, pour une fois, ils ne s'interrogeront pas sur mon attitude étrange et sur mon manque d'appétit. Ainsi, je peux me remettre en question sans être dérangé, sans que l'on me pose des questions auxquelles je n'ai pas envie de répondre. Soudain, quelqu'un vient me parler. Je l'entends par un simple son. Je lève aussitôt la tête, plein d'espoir. Mais je suis très vite déçu. C'est juste un pote. Le même qui a fait la plaisanterie. «Yo mec, comment ça va ?», qu'il me demande. En lisant cela, je hausse simplement les épaules, même s'il ne peut pas me voir. J'attends un moment avant de lui répondre. Je n'ai pas particulièrement envie de parler. Mais je lui dis que je vais bien. Sans rien de plus. Il me demande aussitôt si je pense à elle. Je n'ai pas envie de lui donner une réponse. Cela ne regarde que moi. Et je ne désire pas d'être le sujet d'une nouvelle blague de sa part. Je ne suis pas d'humeur. Mais à ma grande surprise, il me demande pourquoi je ne vais pas lui parler, puisqu'elle est connectée. «Invite la au ciné.», qu'il a ajouté ensuite.

     

    C'est le soir. La nuit est maintenant tombée. Je suis allongée sur mon lit, sur le côté. Je regarde mon portable. Mon amie vient de me répondre. Je relis sans cesse son message, me repliant un peu plus sur moi-même. J'ai froid. Je n'aime pas l'hiver. Ma main tremble légèrement tandis que mes yeux parcourent une nouvelle fois le SMS. «Tu ne serais pas amoureuse, toi, par hasard ?», qu'elle m'a dit. Et lorsque j'y pense, mon cœur se serre une nouvelle fois. Il se pourrait bien qu'elle ait raison, et cela me fait peur. Je n'ai pas envie de tomber amoureuse. L'amour, cela fait plus de mal que de bien. Je le sais, j'ai assisté aux dégâts de ce sentiment. Mon père aimait les clichés, il a trompé ma mère avec sa secrétaire. Plus d'une fois. Il n'avait pas l'excuse de l'alcool. Il avait pleinement conscience de ses actes. Ma mère l'a découvert. Elle l'a fichu à la porte en jetant ses affaires par la fenêtre et en faisant changer la serrure de la porte pendant qu'il était parti à un de ses prétendus voyages d'affaire. Il a fait une drôle de tête lorsqu'il est rentré. Mais ma mère n'a accepté de lui parler qu'au moment du divorce, et elle a pleuré pendant des jours. Elle se refermait sur elle-même, refusant de sortir, de quitter son canapé, plongeant lentement vers la dépression. Je l'aidais du mieux que je pouvais, mettant mes études de côté, si bien que mes notes ont chuté. Au final, je suis allée vivre chez ma tante, ma mère ne voulant pas que ses propres problèmes m'affectent. Je ne le souhaitais pas au début, comme je refuse obstinément de voir mon père. Mais elle m'a promis que je retournerai chez elle, un jour, lorsqu'elle ira mieux. Mon portable vibre soudainement dans ma main. Je regarde le message. Encore mon amie. «Tu devrais lui dire, sinon, tu vas le regretter.», qu'elle me dit. Je finis par cacher mon portable sous mon oreiller. Je ne veux plus lire ses conseils. Je ne veux pas sombrer comme ma mère. Je ne comprends pas pourquoi les gens cherchent l'amour. Il crée trop de dégâts, de souffrances inutiles. Et pourtant, on souffre aussi quand on n'en a pas. C'est peut-être pour cela que l'amour est tant recherché. Si on doit souffrir, autant être heureux avant. Parait-il que l'amour, cela rend heureux. Je ne sais pas. Ce sentiment est tellement inconnu pour moi, et pour l'instant, il me fait plus de mal que de bien. Je ne veux pas tomber amoureuse, et pourtant, je crois que je n'ai pas tellement le choix.

     

    C'est le soir. La nuit est maintenant tombée. J'ai écrit de quoi entamer une conversation avec elle, mais je n'ose pas l'envoyer. Et si elle ne me répondait pas ? Et si elle n'avait pas le temps, ni l'envie de me parler ? Mon pote ne cesse de me harceler pour savoir si je me suis décidé à lui parler. Il m'agace quand il fait cela, quand il est incapable de s'occuper de ses affaires. Il peut être lourd quand il s'y met, et c'est sans doute pour cela que je n'ai pas spécialement envie de lui parler d'elle, de me confier à lui. C'est un bon pote, mais cela reste là. Il n'est pas plus, il n'est pas moins. Je ne sais pas comment m'en débarrasser pour qu'il me laisse enfin tranquille. Je préfère l'ignorer, et me concentrer sur cette simple phrase que j'ai écrite, mais que j'hésite tellement à envoyer. J'espère qu'elle m'aime bien. Du moins, un peu... Je crains que ce ne soit pas le cas, et qu'elle ne me voit que comme un ami. Ce serait déjà bien. Mais pas suffisant. J'aimerai avoir plus. Sans plus réfléchir, j'envoie le message, et j'attends.

    C'est le soir. Il fait nuit. Je suis sur mon lit. J'ai pris une peluche qui traînait et je l'ai serré contre moi. J'ai mal. J'ai peur. J'ai l'impression de perdre le contrôle de la situation. J'ai horreur de cela. J'aime bien contrôler, je n'aime pas les imprévus. Et là, je ne me sens pas bien. Le temps passe à une lenteur affolante. J'ai envie que l'heure soit venue de dormir, pour sombrer dans un sommeil profond où les problèmes n'y ont pas leur place. Histoire de les oublier, l'espace d'un instant. Et puis soudain, j'entends un bruit, provenant de mon ordinateur. Je ne tarde pas à réagir. Je me redresse, m'asseyant sur mon lit. Je reste un instant sans bouger, le regardant avec curiosité. Quelqu'un vient de me parler. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. J'espère que c'est lui. Mais je crains que ce ne soit pas le cas, et si c'est cela, je préfère de ne pas le savoir. Je me lève, et je m'approche doucement de mon bureau. Je m'installe sur ma chaise, et je vais sur la page internet. C'est lui. C'est lui qui m'a parlé. Mes lèvres esquisse un sourire. Et je lui réponds que je vais bien, pour ensuite lui renvoyer la question. Il me dit qu'il va bien, et me demande ce que je fais, deux minutes plus tard. Je lui réponds que je ne fais rien. Puis, il ne répond plus. J'attends. Je suis devant mon ordinateur, tapant nerveusement du pied, me rongeant les ongles. Je n'aime pas quand il fait ça. Cela me stresse. J'ai l'impression que je ne compte pas pour lui. Et cela fait mal, terriblement mal.

     

    C'est le soir. Il fait nuit. Je suis devant mon ordinateur, et j'hésite. Je voudrais suivre le conseil de mon pote, et lui proposer d'aller au cinéma. Une petite sortie rien que tout les deux. Mais j'hésite. Et si elle ne voulait pas ? Je n'aime pas ses réponses. Elles sont vagues, trop vagues à mon goût. Et si elle n'en avait rien à faire de moi ? Je respire un grand coup. J'essaie de faire le vide dans ma tête, de ne plus penser à rien. Calmement, je lui écris quelque chose. Une phrase simple, une demande sans superficialité. Simplement un «ça te dit qu'on aille au ciné ce week end ?». Ce n'est pas bien méchant. J'attends un instant, mes pensées se bousculant dans ma tête. Et si elle refuse ? Si, par cette simple proposition, elle se doute de quelque chose ? Et si, elle s'éloigne de moi ? Je secoue légèrement la tête, et sans réfléchir davantage, j'appuie sur une touche pour l'envoyer. Dès lors, je ne quitte pas l'écran des yeux, et le stress monte en moi. J'ai du mal à rester en place sur ma chaise, remuant sans cesse. J'aimerais accélérer le temps, même si je crains sa réponse. Je vois qu'elle écrit quelque chose, peu de temps après que j'ai envoyé le message. Je ferme les yeux. Je ne veux pas voir la réponse. J'ai peur d'un refus. J'entends le son. Elle m'a répondu, ça y est. Je tente de rester calme. Et j'ouvre doucement les yeux, pour voir avec soulagement et bonheur ce qu'elle a écrit.

    «Pourquoi pas. Je dois aller manger. On en reparle demain ?»

    Il fait jour. Le soleil vient de se lever. J'ouvre doucement les yeux et je souris en voyant les rayons lumineux traverser les volets en bois. Aujourd'hui sera une belle journée ensoleillée. Je reste un peu allongée sur mon lit, ne pensant à rien d'autre qu'à lui. Je finis tout de même par me lever avec douceur, sans me presser. Je prends mon portable qui est sur la table de nuit pour l'allumer et voir si j'ai un quelconque message. Il y en a un. De lui. Je l'ouvre sans attendre. «J'ai hâte d'être cette après-midi. Je passe te prendre ?» Je souris une nouvelle fois. J'ai l'impression que mon cœur bat à une vitesse folle. Je lui réponds avec hâte avec sans aucun doute un sourire niais, pour ensuite reposer mon téléphone à sa place initiale. Je m'approche lentement de ma fenêtre. Je l'ouvre, ainsi que les volets. Le ciel affiche encore quelques teintes rosées et un vent frais glisse sur mon visage. Je ferme les yeux et je savoure ce doux moment.

    C'est le matin. Le matin d'une belle journée. Le matin d'une possible belle histoire...

     

     


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