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    Un silence répondit aux bredouillements de la jeune femme. Carson avait du mal à en croire ses yeux, tellement que la scène était surréaliste. Il l'avait tellement imaginé, ce moment, où elle se tiendrait de nouveau devant lui, prête à assumer ses actes et à tenter le tout pour le tout pour sauver leur couple et leur histoire d'amour. Il l'avait pensé honteuse, gênée, désespérée à l'idée de le perdre, prête à se plier en quatre pour se faire pardonner. 

    Oh oui, il en avait rêvé de ce moment... Il y a de ça presque cinq ans. 

    Aujourd'hui, les choses avaient changé. Elle l'avait trahi et jeté tous leurs projets aux oubliettes, et la rancœur avait remplacé l'espoir de poursuivre leur histoire. Le jeune homme ne comprenait même pas pourquoi Eleonore se tenait devant sa porte, ce soir. 

    La stupeur laissait place à l'incompréhension. 

    Dépité, les épaules de Carson s'affaissèrent, il soupira et détourna la tête de cette situation pathétique sans aucun sens.

    -Tu me laisses entrer ? Demanda timidement Eleonore qui était au comble de la gêne.

    Elle avait conscience que son retour tombait comme un cheveu dans la soupe, qu'il n'était certainement plus attendu ni même espéré, et tout cela la mettait terriblement mal à l'aise. Et pourtant, il lui semblait que, parmi toutes les décisions qu'elle avait bien pu prendre ces dernières années, celle de revenir sur Belderas était la meilleure.

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    Lui accordant à peine un regard, le jeune homme haussa simplement les épaules avant de rentrer chez lui, tout en laissant la porte ouverte afin de l'inviter à rentrer. Il était las, et n'avait pas la moindre envie de lutter et de lui claquer la porte au nez. Sa tête se remplissait d'interrogations, de tentatives de compréhension de la situation. Il n'arrivait plus à saisir le tour que la vie semblait lui jouer. Tout était à ses yeux tellement surréalistes.

    Le retour de l'être aimé quand on ne l'attend plus n'arrivait pourtant que dans les films.

    Eleonore le suivit à l'intérieur en faisant attention à faire le moins de bruit possible. Elle avait la désagréable impression de devoir marcher sur des œufs, sentant la situation était tendue et que la moindre faute pourrait la faire terriblement basculer. Elle observa la maison avec nostalgie, les souvenirs d'une vie commune avec Carson lui revenant en mémoire. Elle avait soudainement le sentiment que cela faisait une éternité qu'elle n'avait pas mis les pieds ici, après qu'elle ait fui Belderas sans se retourner, ne laissant derrière elle que du désespoir concentré en quelques mots dans un carnet.

    -C'est fou, ça n'a pas tellement changé, ici. Bredouilla-t-elle, désirant briser la glace sans trop savoir comment s'y prendre. 

     

      


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    -Qu'est-ce que tu viens faire ici, Eleonore ? Se contenta de soupirer Carson, n'ayant absolument aucune envie d'une conversation d'une banalité sans nom. La présence de son ex-fiancée n'était plus tellement désirée, et discuter avec elle de la pluie et du beau ne faisait pas partie de ses souhaits. Plus maintenant, en tout cas. 

    Le coeur de la jeune femme se serra à l'entente de son prénom. Lorsqu'ils étaient ensemble, le jeune homme avait pris l'habitude de l'appeler par son diminutif, Ellie, et constater l'abandon de ce sobriquet ne faisait qu'établir une distance douloureuse entre eux deux.

    Eux qui avait été si proche, autrefois.

    -Je suis revenue pour toi. Avoua-t-elle finalement, jugeant préférable de jouer la carte de l'honnêteté, sans tergiverser. Elle laissa son mal-être de côté, prête enfin à affronter celui qu'elle avait tant aimé, et qu'elle aimait tellement encore.

    -Cinq ans... Il t'en aura fallu du temps pour retrouver le chemin de la maison. Ne put s'empêcher ricaner Carson, tellement la réponse de son ancienne compagne lui semblait absurde.

    -Certes, mais cela ne change en rien la sincérité de ma démarche. Si je suis ici, c'est uniquement pour toi. Je suis revenue à Belderas uniquement pour te revoir, Carson. Affirma-t-elle avec plus d'assurance, essayant de contenir des tremblements dans sa voix. Elle sentait la situation lui échapper, constatant que la patience de son ex-fiancé était devenue plus limitée avec le temps. 

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    -La bonne blague, c'en est presque touchant. Railla aussitôt le jeune homme en se retournant pour faire face à Eleonore. Tu t'es réveillée un beau matin en te disant qu'il serait peut-être bien de revenir faire un coucou à l'autre idiot que tu as trahi et quitté comme un malpropre ? 

    -Je ne t'ai jamais pris pour un idiot, et cela fait plusieurs mois que j'envisageais de revenir. Mon départ n'a jamais eu pour but d'être définitif. Répliqua la brunette, la gorge nouée, mais multipliant les efforts intérieurs pour ne pas se décomposer. 

    -Première nouvelle. Ce n'est pas l'impression que donnait ton misérable mot que tu as eu la bonté de me laisser à ton départ.

    -C'est toi qui m'a demandé de partir.

    -Ce n'est pas une raison pour être partie. Trancha Carson, blessé, désemparé d'entendre de sa bouche qu'elle n'avait décidément pas eu l'intention de se battre pour eux. De tout faire pour sauver leur couple, pour se racheter à ses yeux. Elle a laissé tomber, baissé les bras, acceptant sans broncher une sentence non-réfléchie. 

    Pathétique. Risible. Décevant. Blessant. Tant d'années gâchées.    

     

     


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    -Comprends moi Carson, je me sentais mal, je t'avais blessé, tu étais en colère... Je ne savais pas quoi faire, alors j'ai jugé qu'il serait mieux que je parte quelques temps, le temps de digérer tout ça. Tenta-t-elle de s'expliquer maladroitement, déstabilisée, perdant pied. Elle ne contrôlait plus rien. La conversation filait, les comptes semblaient vouloir se régler alors qu'Eleonore ne l'avait pas du tout prévu ainsi. Elle voulait partir sur de nouvelles bases, et tout semblait partir en vrille sans qu'elle ne parvienne à limiter la casse. 

    -Tu es revenue pour geindre ? S'exaspéra Carson, dont la lâcheté de son ex l'horripilait. Elle apparaissait incapable d'assumer ses erreurs, et cela l'agaçait prodigieusement. Il n'avait absolument pas besoin d'entendre des excuses foireuses, inutiles, abjects. Surtout pour une vieille histoire qui n'était plus. -Car sérieusement, il n'y a pas de raison. Ce n'est pas moi qui t'ait planté un couteau dans le dos en allant voir ailleurs, que je sache. 

    -Si tu savais comme je m'en veux pour ça... 

    -J'en ai rien à foutre. Cingla-t-il avec une violente sincérité. Tu t'es faite sauter par mon meilleur ami, et rien de ce que tu pourras dire ne pourra changer ça. 

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    -Carson, je me sentais mal à l'époque, je me mettais une pression de dingue. Se justifia tout de même la jeune femme, préférant régler une bonne fois pour toute cette histoire, cette faute qu'elle regrettait amèrement. Elle réalisait qu'ils n'avaient jamais eu l'occasion d'en discuter, de parler de leurs problèmes, et elle profita l'occasion pour s'expliquer, laissant la conversation filée, oubliant que ce n'était certainement pas le moment adéquate et que Carson n'était pas prêt à l'entendre. Je voulais terriblement te rendre heureux, t'offrir cette vie, cet avenir dont tu rêvais. Mais je culpabilisais. A cause de mes fausses couches, à cause du soucis que je te causais, à cause du fait que je n'arrivais pas à passer outre et que j'étais obnubilée par ce désir d'enfant. Je voulais te donner ce fils que tu désirais, je voulais être la femme parfaite pour toi, mais j'arrêtais pas de me dire que j'étais bonne à rien car je n'étais pas fichue de t'offrir ce que tu rêvais d'avoir. 

    -Je ne t'ai jamais demandé ça ! S'offusqua alors Carson, choqué d'entendre de tels propos venant de la bouche de son ex. Je ne t'ai jamais demandé d'être parfaite ! Je ne t'en ai jamais voulu pour tes fausses couches et j'ai jamais exigé de toi que tu me fasses un fils le plus rapidement possible ! Je t'avais même dit qu'on laisserait la nature suivre son cours et qu'on reparlerait plus sérieusement des enfants après le mariage ! 

    -Je sais bien !! Mais tu étais tellement adorable, tellement attentif et attentionné, que je ne me sentais pas à la hauteur ! Je me disais que j'étais pas assez bien pour toi, et je me mettais une pression monstre pour être digne de toi ! Et plus tu te mettais en quatre pour moi, plus je me haïssais d'être ce que j'étais, une pauvre femme pitoyable bonne qu'à se lamenter sur son sort !

     

     


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    -Ça y est, ça va être de ma faute maintenant si tu t'es tapée mon meilleur ami. Ne put s'empêcher de rire jaune Carson en se frottant doucement le front, n'en croyant pas ses oreilles. Voilà qu'il avait été trop prévenant avec elle, la blague était bonne ! Être cocu pour avoir été trop gentil, une belle peine pour une si terrible faute visiblement ! 

    -Je n'ai pas dit ça. 

    -C'est exactement ce que tu as dit. Assura-t-il. Déjà à l'époque tu me sortais que tu t'en voulais de ne pas me donner d'enfant, et voilà que tu me sors que tu culpabilisais davantage quand je m'inquiétais pour toi ! Ça me fait doucement rigoler, tu m'excuseras. Si je n'avais pas été là, j'aurais été un connard, mais là, j'étais trop gentil donc je suis cocu. 

    -Arrête, ce n'était pas toi le problème, et je t'interdis de me faire dire le contraire. Rectifia Eleonore en serrant les dents, la tension émanant de la situation commençant à jouer sur son humeur. La colère de Carson allait à se transmettre en elle, et elle savait que cela serait totalement contre productif si elle se mettait à crier à son tour. Tout ça, toutes ces conneries dont je te parle, c'était dans ma tête. C'était totalement ridicule, j'en ai parfaitement conscience aujourd'hui, mais à l'époque j'étais obsédée par mes problèmes pour avoir un enfant, je me sentais coupable car pour moi, c'était mon rôle de te donner des enfants ! Mon rôle en tant que femme de te donner des enfants ! 

    -Ils t'en auront inculquer des conneries tes parents, c'est fou. Soupira Carson, où Eleonore leva les yeux au ciel. Son ex-fiancé n'avait jamais porté ses parents, assez conservateurs, dans son coeur, et ces derniers lui avaient bien rendu lorsqu'ils ont fait sa connaissance. Ce qui a eu finalement pour conséquence que le couple McGuire ne voulut plus entendre parler de leur fille tant qu'elle serait avec lui. Et le rôle de Ryan dans tout ça ? En quoi ta culpabilité de merde justifie que tu te sois tapée mon meilleur ami ? 

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    -Ce n'était qu'une erreur Carson, arrête de parler de ça comme si ça avait de l'importance alors que cela ne rimait à rien. Le rappela-t-elle à l'ordre, agacée qu'il en fasse une montagne alors que cela n'avait rien signifié pour elle. 

    -Pas important ? Cela a détruit notre couple Eleonore ! S'offusqua-t-il, ayant du mal à conserver un semblant de calme. En t'envoyant en l'air avec lui, tu as foutu en l'air toute notre histoire, tous nos projets, tout notre avenir ensemble ! Tu en as conscience, de ça ? 

    -Tu n'as pas l'impression d'exagérer un peu, alors que tu ne sais rien de ce qui s'est passé ? Soupira d'exaspération la jeune femme, vexée qu'il ne réduise la fin de leur couple qu'à une erreur de parcours, une stupide erreur qui n'avait pas compter pour elle. Tu crois sérieusement que je me suis levée un matin en me disant que j'allais te tromper avec le premier venu ? Tu me prends pour qui sérieusement ? 

    -Pour rien, c'est bien ça le problème. J'ai l'impression de ne plus te connaitre, d'avoir une inconnue en face de moi. La femme que j'ai aimé n'aurait jamais fait ça. 

     

     


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    Un silence pesant s'instaura entre eux suite à ces dernières paroles. Eleonore ne sut pas quoi répondre et Carson se contenta de laisser échapper un soupir de lassitude. Chacun se replongea dans leurs souvenirs, se remémorant les moments passés ensemble, lorsqu'ils étaient heureux, amoureux, prêts à croquer la vie à pleines dents dans l’insouciance la plus totale. Une époque où ils ne vivaient que d'amour et d'eau fraîche, où ils formaient le couple idéal, jalousé de tous.

    Quel gâchis.

    -Le pire, c'est que j'aurais pu te pardonner. Finit par avouer Carson, désabusé. Si tu n'étais pas partie, au final, j'aurais pu te pardonner et aller de l'avant. 

    -Honnêtement, j'en doute Carson. Soupira à son tour Eleonore, nullement convaincue par l'affirmation de son interlocuteur. A ta réaction quand tu nous as surpris, ta colère et la virulence de tes propos quand tu m'as ordonné de partir, je doute fortement que tu aurais pu me pardonner à l'époque. 

    -Comment tu peux le savoir, tu es partie sans te battre. Tu sais pourtant comment je suis quand je suis en colère, mes mots vont plus loin que ma pensée. Tu me connais, j'étais à chaud, je me suis emporté de manière disproportionnée... Tu serais restée pour qu'on parle, tu te serais battue...

    -Non Carson, je ne le savais pas. Tu sembles l'oublier, mais jamais tu ne t'étais emporté comme ça avant ce jour-là. Pas avec moi en tout cas. Lui rappela-t-elle la gorge nouée. Tu t'étais déjà mis en colère, mais jamais autant. Comment voulais-tu que je sache que tu ne voulais pas que je m'en aille ? 

    -En restant. Tu aurais du rester ! Cracha-t-il sur un ton de reproche, la colère refaisant surface après une légère accalmie. Tu aurais du te battre pour nous ! Te battre pour recoller les morceaux et sauver notre couple ! Mais t'es partie comme une voleuse sans te retourner, sans même essayer ! Tu es partie, et tu as tout jeter à la poubelle, comme si cela n'était plus rien pour toi !

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    -Ne me mets pas tout sur le dos Carson, car je te signale que tu n'as pas particulièrement cherché à me retrouver durant toutes ces années. Lui souligna-t-elle en fronçant les sourcils d'agacement. J'ai vécu pendant plusieurs mois dans un hôtel au centre de Belderas, et jamais tu n'as essayé de me retrouver. 

    -J'ai essayé de t'appeler ! J'ai passé des jours au téléphone à essayer de te joindre, mais je tombais toujours sur ton répondeur !

    -Parce que j'étais tellement désespérée quand je suis partie que je ne savais plus ce que je faisais, mon téléphone a fini dans les toilettes ! Répliqua Eleonore avec un mouvement de recul, réalisant que la situation dérapait une nouvelle, tout deux commençant à se braquer de plus en plus. J'ai passé des jours enfermée dans une chambre miteuse sans savoir quoi faire de ma vie parce que j'étais persuadée que tu ne voulais plus de moi. J'avais tout misé sur toi Carson, tout absolument tout, et tout est parti en fumée. J'ai autant souffert que toi dans cette histoire, parce que comme je n'avais plus de signe de vie de ta part, j'étais persuadée que tu m'avais rayée de ta vie. Moi aussi, j'y ai laissé des plumes, dans cette histoire !

     

     


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